lundi 22 avril 2013

Soigner Po


Vendredi soir. Po s’inquiète. Automatiquement, ça m’inquiète. Tu trouves pas que Po miaule bizarre? « Bin non, elle fait tout le temps ça. » Ça paraît qu’il vit pas avec Po depuis 18 ans, le Ringuette. Je suis Po, j’essaie de voir ce qui va pas. Après deux aller-retours à la litière, je vois qu’elle cherche à uriner dans des endroits inhabituels. (Le garde-manger? Quelle idée, Po!) Po qui pleure, urine sanguinolente… Ça ressemble beaucoup à une cystite. Encore. J’appelle un vétérinaire dans une clinique d’urgence, qui réussit à me rassurer un peu. Je pourrai attendre au lendemain, nul besoin de me rendre à Lachine en pleine nuit et de payer le triple du tarif habituel.

Mathieu m’envoie un tweet : « As-tu besoin de soutien? Veux-tu que je vienne? » Je lui dis que c’est pas nécessaire, que je gère ça pas mal mieux que l’été dernier, mais il s’en vient quand même. Yé fin, mon Mathieu. Po reste couchée sur mon lit, Mathieu et moi on joue au Nintendo sur nos portables. Je veille sur ma vieille picouille jusqu’à six heures, puis je tombe de fatigue. À huit heures, je l’entends sortir de sa litière, alors je me lève pour récolter un échantillon d’urine que je range aussitôt au frigo — non, ça peut pas être confondu avec du jus de pomme, à moins que ton jus de pomme habituel se vende dans des petits pots de 60 ml avec une étiquette blanche drabe sur laquelle c’est écrit l'adresse d'une clinique vétérinaire ou médicale ainsi que le nom et l'adresse du patient. Je me recouche.

Samedi. Vers onze heures, je me réveille de nouveau, alors que Mathieu se prépare à partir chez Vickie, et j’appelle à la clinique pour prendre un rendez-vous. On me dit que l’échantillon d’urine n’est déjà plus bon. Argh. Ringuette me fait remarquer que tant qu’à payer pour un examen médical, je devrais en profiter pour changer de clinique. Bonne idée. Ça me coûtera deux fois moins cher de taxi, leurs tarifs sont moins élevés, et le dossier de Po est déjà transféré. C’est sans rendez-vous, mais il faut que j’arrive au plus tard à 15 heures puisque la clinique ferme à 16 heures. Po a passé une nuit entière sans montrer de signes de douleur, mais là elle recommence à pleurer et faire des peupis sanguinolents.

Là, je dois trouver des roupies. Me reste un billet de 20 et un tas de monnaie, that’s it. La veille, Darnziak m’avait dit de pas m’en faire avec l’argent, qu’il pourrait m’en prêter. Je vais donc faire un aller-retour à Villeray. T’as vu le film Run Lola Run? C’est rien, ça. Tchèque-moi, je cours comme si j’avais une bombe dins tchulottes. Une chance que je porte mes pegasus boots. Darnziak est lendemain de veille. Grosse soirée avec l’autre Morin. Le pauvre, je l’oblige à se traîner jusqu’au guichet. Avant qu’il me remette l’argent, je reçois un texto de Ringuette. « Po a eu une grosse diarrhée deg ou du vomi couleur caca. » Hon. Où? « Sur tes fils de portable. :D »

Je cours jusqu’au métro, puis j’en ressors à 14:47. Hiiiiiii. Pendant que je me rends chez moi, j’appelle un taxi. « Je serai prête dans cinq minutes, avec un chat dans une cage. » Ça me laisse tout juste le temps de mettre Po dans sa cage de transport, pas le temps de ramasser le renvou. Je prie fort pour qu’il ne se transforme en blob de renvou durant mon absence.

À l’hôpital vétérinaire, Po est prise en charge par un gentil docteur qui parle un peu comme Normand L’Amour. Il me dit qu’il s’entend mieux avec les chats qu’avec les humains, et qu’il porte une attention spéciale aux vieux. « Peut-être parce que je suis vieux moi-même… » Aon. Je l’aime déjà, lui. Il examine Po après avoir lu son dossier médical.

— On va prélever un échantillon d’urine avec une aiguille fine.
— Ça va pas être douloureux? … [J’arrive sûrement pas à cacher mes sourcils d’inquiétude]
— Je dirais pas que c’est douloureux. Inconfortable, plutôt. Comme une prise de sang.
— Et c’est pas du tout risqué?
— Non. Je vous donne ma parole.

Il amène Po dans la zone secrète des vétérinaires, et je vais patienter dans la salle d’attente, où je fais la connaissance d’un shih-tzu intéressé par à peu près tout dans la pièce.

Dr L’Amour revient me chercher avec Po dans ses bras. Il m’explique que c’est assez difficile de voir si l’inflammation de sa vessie est causé par une infection ou par une tumeur. Pour le savoir, il faudra refaire un examen, et cette fois envoyer l’échantillon de peupi dans un labo. Pour l’instant, il peut donner à Po un analgésique et un antibiotique. Cette fois, pas besoin de lui administrer des comprimés deux fois par jour : il lui fait une injection, et hop. Po, maudite chanceuse, a droit à cinq jours de buprénorphine. On lui donne la première dose tout de suite. « Oh, en passant, ça te fera rien si t’en prends. Une dose pour chat, c’est pas grand chose pour nous. » Nenon, j’ai pas l’intention de voler les médicaments de Po!

Po qui attend sagement pendant qu'on analyse son peupi.

Po qui a l'air de trouver ça long pis plate.

Sans même effectuer de prélèvement et d’examen à 200$, Dr L’Amour me confirme que les petites masses que Po a sur l’abdomen sont fort probablement cancéreuses. « Je charcute pas un chat de cet âge-là, surtout que ça risque de rendre les tumeurs encore plus agressives. » Si j’ai bien compris, ses tumeurs sont indolores, et Po a de bonnes chances de vivre avec pendant un bon moment si elles continuent d’évoluer à ce rythme. Je suis prête à vendre un de mes reins pour soigner Po, à condition qu’elle ait une belle qualité de vie. Pas d’acharnement thérapeutique. « Parfait, on s’entend totalement là-dessus. » Vu qu’il est passé 16 heures — le staff de la pital a hâte de quitter — le Dr L’Amour me dit que je peux l’appeler le lendemain pour plus de détails. Je vais à la caisse pour payer — 223,16$, merci Darnziak — puis j’appelle un taxi. Je vais quand même pas marcher vingt minutes sous la grêle et le vent avec une Po malade.


Avant de quitter la pital vétérinaire, j’ai vu un chien qui s’appelle Steve.

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